Champ lexical d'abandon
Le nom (un) abandon est issu du syntagme en ancien français (mettre) a bandon « mettre à disposition, livrer » ; bandon signifiant à l'origine « pouvoir, puissance » est issu du croisement des radicaux ban- (du francique bannjan « bannir ») et band- (du francique bandjan « faire signe »). Les sens de ce nom et du verbe abandonner ont sensiblement évolué.
Un abandon est défini d'abord comme l'action de rompre le lien qui attachait une personne à une chose ou à une personne. Pour l'OQLF, un abandon de panier est l'action qui consiste, pour le visiteur d'un site marchand, à quitter celui-ci sans commander quoi que ce soit après avoir placé des produits dans son panier virtuel. C'est aussi l'action de renoncer à la possession d'un bien, par exemple en faveur d'un créancier, et l'action de cesser de s'occuper d'une chose à laquelle on était lié par l'intérêt qu'on lui portait, par un engagement, etc. (un abandon de poste, des traditions, d'une lutte, souvent dans un contexte politique ou militaire). D'où abandonner un endroit, quitter un lieu, ne plus l'occuper, dans la langue du droit « abandonner le domicile conjugal » et dans le langage militaire « abandonner son poste ». On peut aussi laisser à quelqu'un la possession ou le soin d'un bien (ou d'une personne), laisser quelque chose à l'entière disposition de quelqu'un. Noter l'expression abandonner à quelqu'un le soin de faire quelque chose.
Le Dictionnaire historique du français québécois indique que l'abandon était l'ancienne coutume rurale selon laquelle on laissait les bestiaux paitre librement à travers la campagne à certaines époques de l’année (on les abandonnait), en particulier dans des champs débarrassés de leurs récoltes, ainsi que le fait de laisser paitre ainsi les bestiaux, de leur rendre accessibles des terres pour qu’ils y paissent librement. L’abandon parait avoir été pratiqué jusqu’au 20ème siècle, notamment dans des champs appelés bandons qu’on livrait aux animaux avant les semailles ou après les récoltes.
En escrime, c'est le mouvement par lequel on quitte le fer soit en marchant, soit en prenant le plus long pour aller aux parades. On parle alors de l'abandon d'un boxeur, à la différence d'être battu aux points, être battu par disqualification de l'arbitre. Pour les courses hippiques, le nom abandon a été choisi comme équivalent à l'anglais D.N.F., did not finish (n'a pas fini), forfait correspondant à D.N.S. did not start (n’a pas pris le départ). Ceux qui abandonnent renoncent à poursuivre une action, une recherche ; ils renoncent à une entreprise, à un projet. Le verbe abandonner est alors utilisé pour cesser de défendre une cause, renoncer à des principes, à une idée en les rejetant ou simplement en s'en séparant. D'où l'expression abandonner (la partie), renoncer à poursuivre une compétition.
L'abandon se définit aussi comme l'action de cesser de s'occuper de quelqu'un qui on était lié par un lien d'affection ou d'obligation, de l'abandonner. Un abandon d’enfant est l'acte par lequel la mère abandonne ses droits parentaux et remet son enfant à l’Aide sociale à l’enfance ; un abandon de portée désigne le comportement anormal de certaines femelles qui refusent de se laisser téter. Le tour d’abandon était un dispositif tournant, placé dans l’ouverture d’un mur de couvent ou d'hôpital, permettant d’abandonner des nouveau-nés dans l'anonymat. Au 19ème siècle, de nombreux romans ont eu l'abandon pour thème, par exemple François le Champi (c'est-à-dire abandonné dans un champ), généralement avec une mère contrainte de se séparer de son enfant, pour l'honneur de la famille ou en raison de sa misère. L'indifférence de la mère vis-à-vis de son nouveau-né ou l'illégitimité de sa naissance sont rarement évoquées comme motifs. Par contre, l'enfant abandonné, souvent assimilé à un enfant naturel, est fréquemment décrit défavorablement, s'intégrant mal à la société. La littérature actuelle aborde cette question d'une manière plus complexe, plus réaliste. Une approche plus complète est consultable sur Persee. La névrose d'abandon est un état permanent d’insécurité datant de l’enfance, lié à la crainte, motivée ou non, d’être abandonné. En psychanalyse, l'enfant abandonnique vit, sans raisons, dans cette crainte et l'abandonnisme est l'état psycho-affectif d'une personne, notamment d'un enfant, qui vit dans la hantise d'être abandonnée.
L'abandon désigne aussi l'état résultant de l'action de délaisser, de laisser à l'abandon des choses, mais aussi des personnes et des animaux. Cet abandon est souvent qualifié de total, complet, parfois entier, absolu. Abandonner quelqu'un, c'est le quitter, se séparer de lui, ne pas lui rester fidèle. Abandonner un cheval, c'est le laisser aller librement en relâchant les rênes. On lisait en abandon pour à l'abandon, qui est dans un état de délaissement. Abandonner quelqu'un à son sort, c'est le laisser à la merci d'un danger, d'une difficulté, le laisser en proie à une force hostile. On lit fréquemment que des quartiers sont abandonnés par l'État, que des personnes sont abandonnées par le système médical ou par la société. Une des réponses qui ne convainc plus est que le gouvernement "ne laisse personne au bord de la route". L'appel à la résilience est compris comme la nécessité de se résigner, de subir.
Dans un sens plus littéraire l'abandon est l'action de laisser aller son corps, son cœur, son esprit, etc. à leur pente naturelle, (avec l'effet, parfois désagréable, qui en résulte). Il peut s'agir d'une manière d'être, d'écrire ou de peindre. S'abandonner (soi-même) signifie se laisser aller, renoncer à agir, à lutter, renoncer à la surveillance ou à la maitrise de soi-même, laisser aller son corps, son esprit, mais aussi ne plus prendre soin de soi-même, se négliger. Pour des écrivains, s'abandonner à quelqu'un a le sens de se donner, se confier, se livrer à lui. Les personnages peuvent également s'abandonner à un état, un sentiment, un plaisir, une passion, une action, parfois s'abandonner à faire quelque chose. On a lu abandonnément, en se donnant sans retenue. L'expression s'abandonner aux mouches était comprise comme ne plus avoir de souci de sa personne ou de ses intérêts, être dégouté de tout, jeter le manche après la cognée. On a lu aussi abandonnément, en se donnant sans retenue. Un abandonnement était l'action d'abandonner une personne, ou parfois des choses concernant une personne, l'état d'une personne abandonnée, l'action de s'abandonner, de laisser aller tout ou partie de son être.
En droit, l'abandon est le fait de délaisser, de négliger ou de se séparer volontairement d'une personne ou d'un bien ou le fait de renoncer à un droit ou à une procédure. On lit une, un abandonnataire pour celle, celui en faveur de qui est fait un abandon de biens ou d'un droit par une abandonnatrice ou un abandonnateur. On retrouve ces sens pour le verbe abandonner et l'adjectif abandonné, abandonnée, qui désigne (ce) qui est délaissé, quitté, confié à quelqu'un, qui n'est plus occupé, qui n'est plus pratiqué, quelqu'un qui est laissé sans aide, sans assistance, qui a renoncé à agir, à lutter, qui a renoncé à la direction ou à la possession de soi-même. Cet adjectif est aussi utilisé comme nom.
On a lu une abandonneuse, un abandonneur pour celle, celui qui abandonnent, qui ont l'habitude d'abandonner.
Synonymes d'abandon (CNRTL) : renoncement, délaissement, renonciation, cession, résignation, négligence, laisser-aller, démission, capitulation, désertion, simplicité, mollesse, lâchage, franchise, confiance, sacrifice, rupture, reniement, liberté, intimité, détachement, désinvolture, don, abdication, apostasie, arrêt, cessation, changement, dessaisissement, plaquage, rejet, relâchement, retrait, retraite, solitude, suppression, séparation, trêve, volte-face, évacuation, nonchalance, isolement, insouciance, abjuration, abnégation, concession, désintéressement, désistement, détente, exode, expansion, familiarité, fuite, incurie, naïveté, naturel, largage, inconstance, omission, ouverture, rétractation, suspension, vide, épanchement, générosité, fléchissement, faiblesse, abandonnement, alanguissement, armistice, bannissement, confidence, donation, défaite, défection, désappropriation, dévêtissement, non-usage, oubli, passation, placage, reculade, reddition, soumission, sécurité, inoccupation, infidélité , forfait, aliénation, déguerpissement, dépôt, déréliction, désordre, enterrement, exposition, fatalisme, élimination.
Antonymes d'abandon (CNRTL) : abstinence, acharnement, achèvement, acquisition, adoption, aide, appropriation, appui, assaut, assistance, confort, conquête, conservation, contrainte, cérémonie, dynamisme, défense, défiance, détention, effort, endurance, engagement, entretien, entêtement, fermeté, fréquentation, grâce, inculpation, intransigeance, mainmise, maintien, mise en ordre, méfiance, observation, obstination, occupation, ordre, persistance, persévérance, possession, prise, raideur, recherche, respect, rigidité, résistance, secours, soin, soutien, sévérité, tension, vigueur, égoïsme.
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