Champ lexical d'abstraire
Un génie abstracteur, un moraliste abstracteur abstraient, se plaisent à abstraire. Un abstracteur désignait une personne dont l'esprit est porté aux abstractions. Ce mot est dérivé d'abstraction avec le suffixe -eur, ou est emprunté au latin médiéval abstractor.
• Un abstracteur de quintessence désignait un alchimiste qui extrait la cinquième essence ou partie subtile d'un corps, ou un philosophe, un critique, un écrivain, etc. qui se complait jusqu'à l'excès aux abstractions, aux raisonnements subtils.
Une opération mentale abstractive, un procédé abstractif consistent à former des abstractions. Un concept abstractif ou un terme abstractif sont le résultat de l'action d'abstraire, sont formés par abstraction ou servent à exprimer des abstractions. Ce mot, un des nombreux termes techniques créés au 18ème siècle, est dérivé du radical d'abstraction ou est emprunté au latin médiéval abstractivus « qui pratique l'abstraction ». La synonymie abstrait-abstractif a été indiquée.
A. Une abstraction est une opération intellectuelle, spontanée ou systématique, qui consiste à abstraire ; le pouvoir, la faculté d'abstraction ; un usage méthodique de ce pouvoir. Faire abstraction de ... c'est ne pas en tenir compte.
B. Une abstraction est le résultat de l'action d'abstraire ; une idée ou une représentation abstraite ; une idée ou une représentation de la réalité, à la limite sans correspondance avec l'objet. Les abstractions sont, en philosophie, les universaux.
C. L'abstraction est l'ensemble de ce qui est abstrait ; le caractère de ce qui est abstrait, notamment dans les arts.
D. Une abstraction désignait l'état d'une personne qui s'éloigne de la société de nos semblables et se plonge dans une solitude absolue ; un état de rêverie prolongée et plus ou moins pathologique ; l'état d'une personne ou d'un mode de vie isolé, réellement ou par la pensée, de son entourage.
Ce nom est emprunté au bas latin abstractio. Le sens premier « action d'extraire », n'apparait dès les origines que dans les emplois particuliers.
On a lu abstractiser signifiant rendre abstrait, considérer d’un point de vue abstrait.
On a lu abstractivement : d'une manière abstractive ; abstractivement de : abstraction faite, en ne tenant pas compte de. Cet adverbe, dérivé d'abstractif, abstractive, avec le suffixe -ment, est aujourd'hui sorti de l'usage.
Une abstractivité est l'aptitude à abstraire ainsi que le caractère des personnes ayant cette aptitude. Ce nom est dérivé d'abstractif, avec le suffixe -ité.
La locution latine in abstracto signifie de façon abstraite, sans tenir compte de la réalité des faits, sans considérer un cas particulier d'expérience.
Le verbe abstraire signifie isoler, par l'analyse, un ou plusieurs éléments du tout dont ils font partie, de manière à les considérer en eux-mêmes et pour eux-mêmes ; dégager d'un ensemble complexe les traits communs aux éléments ou aux individualités qui le composent. S'abstraire de ... c'est s'isoler par la pensée des choses ou des évènements environnants, notamment sous l'empire d'une préoccupation dominante dans laquelle l'esprit se laisse absorber. Ce verbe est emprunté au latin abstrahere, avec adaptation d'après traire. Dès son apparition dans la langue au 14ème siècle, le verbe abstraire se présente sous sa forme actuelle, mi-savante, le préfixe étant calqué sur celui du latin abstrahere, alors que le radical est celui du verbe traire, de formation populaire. À noter pour le participe passé de ce verbe la forme abstraict est encore attestée à la fin du 16ème siècle. Dès le début du 18ème siècle, ce verbe est reconnu comme défectif, mais les dictionnaires ne s'accordent pas sur l'ensemble du paradigme existant. L'histoire de ce verbe se caractérise par la disparition rapide (dès le 16ème siècle) du sens premier, concernant les séparations quasi physiques que l'on peut opérer entre des réalités, qui par définition ont une existence propre (choses matérielles, personnes, composantes des unes et des autres comme le corps et l'esprit), le développement d'un sens figuré, intellectuel, issu de la scolastique, concernant non les « réalités » mais les « abstractions » qui n'existent que par le travail de l'esprit. Dès le 17ème siècle, les dictionnaires de l'usage ne connaissent plus abstraire que comme terme de philosophie, terme dogmatique et terme didactique. Ensuite, il s'impose comme terme de philosophie et de mathématiques.
j'abstrais, tu abstrais, il abstrait, nous abstrayons, vous abstrayez, ils abstraient ;
j'abstrayais ; ; j'abstrairai ; j'abstrairais ;
j'ai abstrait ; j'avais abstrait ; j'eus abstrait ; j'aurai abstrait ; j'aurais abstrait ;
que j'abstraie, que tu abstraies, qu'il abstraie, que nous abstrayions, que vous abstrayiez, qu'ils abstraient ;
; que j'aie abstrait ; que j'eusse abstrait ;
abstrais, abstrayons, abstrayez ; aie abstrait, ayons abstrait, ayez abstrait ;
(en) abstrayant.
je m'abstrais, tu t'abstrais, il s'abstrait, nous nous abstrayons, vous vous abstrayez, ils s'abstraient ;
je m'abstrayais ; ; je m'abstrairai ; je m'abstrairais ;
je me suis abstraite, je me suis abstrait ; je m'étais abstraite, je m'étais abstrait ; je me fus abstraite, je me fus abstrait ; je me serai abstraite, je me serai abstrait ; je me serais abstraite, je me serais abstrait ;
que je m'abstraie, que tu t'abstraies, qu'il sabstraie, que nous nous abstrayions, que vous vous abstrayiez, qu'ils s'abstraient ;
; que je me sois abstraite, que je me sois abstrait ; que je me fusse abstraite, que je me fusse abstrait ;
abstrais-toi, abstrayons-nous, abstrayez-vous ; sois abstraite, sois abstrait, soyons abstraites, soyons abstraits, soyez abstraite(s), soyez abstrait(s) ;
(en) s'abstrayant.
L'adjectif abstrait, abstraite, qualifie ce qui relève de l'abstraction ; ce qui procède par abstraction ; ce qui a un haut degré de généralité ; ce qui traduit des idées abstraites ; en savoir plus : CNRTL. Il qualifiait aussi celui qui use d'abstractions dans son langage ; dont la pensée se complait dans l'abstraction ; qui s'isole, par la pensée, du monde environnant ; qui est indifférent à ce qui se passe autour de lui ; qui est distrait. Des entités vivantes abstraites, des êtres abstraits se conçoivent sans contenu concret. L'abstrait est ce qui a les caractères de la pensée ou de l'expression abstraite. Ce mot est emprunté au latin abstractus, participe passé de abstrahere. À l'origine, ce mot avait deux orthographes : abstract / abstrait employées indifféremment ; puis ces orthographes ont donné deux mots, mais dont les sens étaient assez mal définis.
L'adverbe abstraitement signifie d'une manière abstraite.
L'adjectif abstrayant, abstrayante, qualifiant celui, celle qui aime à abstraire, est un néologisme du 19ème siècle.
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